À tout juste 62 ans, Christian Lothion vient de quitter la police judiciaire pour débuter une nouvelle carrière… dans le secteur bancaire. Celui qui occupait depuis 2008 le poste très convoité de directeur central de la PJ (DCPJ), le plus élevé dans la hiérarchie, a pris ses nouvelles fonctions la semaine dernière au sein la Fédération Bancaire Française (FBF), où il dirige désormais le département sécurité et conseille Marie-Anne Barbat-Layani, directrice fraîchement nommée de cette organisation, principale représentante patronale du secteur.
Une tradition
Un flic chez les banquiers ? Rien d’étonnant pour la FBF : « C’est très classique, le secteur fait face à de nombreuses problématiques liées à la sécurité (attaques d’agences bancaires ou des transporteurs de fonds, sécurité des paiements…) », nous confie-t-on, sans autre commentaire. Le poste de Christian Lothion n’est pas nouveau dans l’organigramme de la fédération, en effet. Ce dernier remplace Gérard Girel, 67 ans, qui comme son successeur, avait réalisé toute sa carrière… dans la police. Commissaires de police, tous deux ont occupé plusieurs postes au sein de différents services régionaux de police judiciaire (SRPJ), notamment à Marseille et Lyon, avant de rejoindre la réputée DCPJ. Ils avaient pareillement fait valoir leurs droits à la retraite avant de rejoindre la FBF.
À la FBF, accueillir des directeurs de la PJ retraités est devenu une tradition. Gérard Girel avait ainsi succédé en 2004 à Yves Lucet. Egalement commissaire de police, ce directeur retraité de l’Inspection générale des services (IGS) de la préfecture de police de Paris avait également été employé par la FBF comme conseiller sur la sécurité auprès du directeur.
Compétences et conflits d’intérêts
Leurs compétences en matière de surveillance financière ne font pas de doute – Christian Lothion, comme ses prédécesseurs à la FBF, avaient eu autorité sur un certain nombre d’enquêtes liées au blanchiment, fraude et évasion fiscale, etc. Néanmoins, ces nominations posent une nouvelle fois la question de la contigüité des carrières au service du public puis du privé, de surcroît au sein d’un lobby bancaire. Une pétition lancée fin novembre avait d’ailleurs voulu dénoncer les aller-retours de certains professionnels entre les services d’administration (Bercy en tête) et les banques.
Dans ce contexte, la nomination mi-décembre de la nouvelle directrice de la FBF, Marie-Anne Barbat-Layani, qui a occupé des postes à Bercy, à Matignon mais aussi au Crédit Agricole, avait fait grincer quelques dents. Mediapart avait notamment pointé la « porosité croissante entre l’État et la finance ».
Le site Internet rappelait en outre à la fin d’un récent article consacré au sujet de la corruption et des conflits d’intérêt au sein de la hiérarchie policière que l’article 432-13 de code pénal impose un délai de trois ans entre la cessation de fonctions et la reprise d’un travail dans les entreprises surveillées et que ce délai n’a pas été respecté dans le cas de Christian Lothion.
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